Lutte
d'influence entre Beaujeu et Dun (1100-1180)
Les
deux derniers vicomtes du Mâconnais, père et fils,
détruisent l’œuvre de leurs ancêtres.
Les
Beaujeu sont en pleine gloire
La
fin programmée des Le Blanc, Vicomtes du Mâconnais
Précédemment, nous avons détaillé
l’œuvre des Le Blanc et montré comment ils ont
assuré la protection de leur capitale, Dun, aux quatre
points cardinaux, le NORD profitant d’une défense
naturelle.
• Hugues II crée le château fort du Banchet,
résidence secondaire des Vicomtes à l’OUEST
• Archimbaud II, implante un château fort à
Chevagny le Lombard à l’EST
• Artaud II crée Azolette au SUD
En 1120, date de la
mort de Artaud II, les Le Blanc sont alors au sommet de leur puissance.
De 1120 à 1180, les deux derniers Vicomtes, père
et fils, barbares et sanguinaires, réduisent à néant
l’ouvrage de leurs ancêtres. Ils s’adonnent
au pillage des biens de l’Eglise, Eglise que leurs pères
avaient toujours comblée.
Ils volent les bêtes,
s’octroient les récoltes, incendient les manses et
dépendances de Cluny, réservant le même sort
aux paysans qui doivent s’enfuir dans les bois pour échapper
à la mort.
Cette
réalité dramatique concernant Archimbaud III était
déjà pressentie par Archimbaud II, frére
de Artaud II, puisque dans la Charte qu’il fit pour la fondation
de l’hôpital d’Aigueperse, il fit noter : «
Si un des successeurs se refusait jamais à pareille
approbation, l’évêque d’Autun devrait
l’y forcer ».
Les Sires de Beaujeu engagent une lutte d’influence sous
Guichard III, face à l’ensemble défensif important
des Vicomtes du Mâconnais et avant que cet ensemble ne devienne
offensif.
Guichard
III : qui est ce sire de Beaujeu (1103-1134) en pleine gloire
?
En 1107, les fiançailles entre le roi Louis le Gros et
Luciane de Rochefort, fille du grand Sénéchal de
France, sont rompues pour cause de parenté alors qu’elle
n’avait que 13 ans. Plusieurs seigneurs importants vont
se disputer l’honneur d’obtenir la main de la fille
du grand Sénéchal de France.
Guichard III de Beaujeu, chef du Beaujolais depuis 1103, est le
moins fortuné des prétendants mais il est connu
pour sa bravoure et ses exploits. A la tête d’une
armée redoutée et respectée de ses voisins,
il peut réunir une armée de 200 à 300 chevaliers,
effectif exceptionnel pour l’époque.
Il obtient la préférence
et épouse Luciane en 1108. Devenu proche du roi, imbu de
sa puissance et conscient de sa gloire, il sait tirer avantage,
en habile politique, de cette position pour reculer les limites
de ses états et conquérir de nombreuses terres.
Comme le note Pierre le Vénérable, abbé de
Cluny, « Guichard III utilisa ses dons, non pour le
service de Dieu, mais pour assouvir son orgueil en consumant aussi
la plupart de ses jours dans l’ambition et la vanité
du monde, avec un labeur infini, comme l’araignée
qui tisse sa toile ».
Guichard III : chef de guerre, mais aussi « grand argentier
» à l'heure de la féodalité
Pendant 15 ans, Guichard III est le grand argentier du Vicomte
du Mâconnais et met tout en œuvre pour que la maison
Le Blanc tombe progressivement mais inéluctablement en
son pouvoir.
Les
Vicomtes du Mâconnais vivent au-dessus de leurs moyens :
ils engagent leurs biens en alleu, contre un prêt d’argent
du sire de Beaujeu (en cas de décès sans héritier,
seul le sire de Beaujeu peut racheter le bien). Dans
les faits, Guichard III redonne le bien aussitôt au demandeur.
Celui-ci, avec l’argent reçu, perd son indépendance
et devient inféodé (en fief).
Ce mouvement féodal ascendant (vassal vers suzerain) d’où
sortira la civilisation suivante commence ainsi donc par une révolution
territoriale : la propriété se féodalise,
l’alleu se change en fief. Mais engagement n’est pas
achat, il n’y a pas acquisition mais croissance de suzeraineté.
Ainsi, Guichard III ne fonde la maison féodale des sires
de Beaujeu que sur cette féodalité naissante qui
disparaît au quatorzième siècle, entraînant
la chute de cette maison.
Cet épanouissement financier donne le jour à de
multiples Fondations comme l’abbaye de Joug–Dieu,
en 1115, si chère à Azolette (cf. Naissance
d'Azolette), où le spirituel et l’argent sont
étroitement mêlés.
Pourtant, Guichard III doit riposter aux fortifications des Le
Blanc
Le puissant Guichard III n’avait ni fiefs ni alleux au Nord,
de l’autre coté de la ligne de partage des eaux.
Il
lui faut franchir ce massif du Saint-Rigaud pour réagir
à l’expansionnisme de ses voisins, les vicomtes du
Mâconnais. Singulièrement
perspicace et rusé, il organise la riposte...
Jean
Mortamet
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